Élégiaques

2023

60 x 42 cm, miroirs gravés

Le rapport à soi se pose comme notion maîtresse de cette pièce, reposant sur un principe simple : afin de pouvoir lire le texte qui se présente à lui, le spectateur doit en permanence être dans un alignement parfait avec les gravures, afin d’éviter les reflets de celles-ci. Dans le même temps, cela le force à toujours faire face à son reflet, dans lequel les mots viennent se perdre, et ainsi recréer les dialogues solitaires d’après minuit, éprouvés seul face au miroir de la salle de bain.

Extrait des Élégiaques :

Ici, il y a le vide, qui brûle et vibre dans les échos des clameurs qui résonnent dehors, dans le vieux monde, et qui ébranlent les immeubles ; j’ai beau danser, la course effrénée vers le précipice ne s’arrête jamais ; peut-être que ce n’est pas un gouffre de pierre et de pics, de tours éternelles et de dettes ; c’est aussi un océan, mais lequel ? Au fond j’y gis et vis, brisant cheyant, là où tous les artéfacts mémoriels s’étiolent dans les remous ; 1058 reflets ; la lumière s’ancre dans les rides et les pores ; je suis par maintes fois tenu éveillé, statuaire de poussière et de colère tantôt immobile, tantôt immuable, par la matière nocturne qui fait les rêveries que l’on me garde hors de portée, enfermées dans de grandes cages en verre doré, gardées par des colosses de mensonges, et ils sont les spicilèges d’une mascarade sans début ni fin, qui s’auto-perpétue dans des landes de brumes, au pays de février ; le fabuleux homo stellaris se rêve déjà sans nous, qui dormons entre la terre et le ciel, attachés à aucun des deux ; flottants, errants dans des mers de nuages, emprisonnés dans des cadres de polaroids, immortalisés dans un oubli de silence vrombissant, un jour l’image sera jaunie et racornie et il ne restera que des parcelles reliquaires d’argent rouillé ; corps dérivants, îlots sans pitons, dans un grand creux, mort, morne, morose, myriade d’étoiles filantes condamnées à l’impact ex nihilo, par surprise, naufrage impromptu, ad vitam aeternam, il sort de la machine, accompagné de ses armées de fantômes, à travers les mille et une fenêtres béantes donnant sur leurs esprits malades, pour une dernière chevauchée, en clamant que la vérité est au bout du couloir, derrière l’ultime bord du monde [...].

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